Tricoter, faire naître une membrane de matière de ses mains. Être matrice. Renouer, retrouver le geste perdu. L'ancien. Faire renaître tout en étant soi-même renaissance. J'ai dissous ma peine, je l'ai recueillie entre les filets naissants de mes mains; j'ai dénoué mes sanglots en caressant les fibres. Dessiné le temps qui m'avait filé entre les doigts, je lui ai donné une teinte, une consistance, j'y ai mêlé des chants et des murmures balbutiants d'un nouveau moi qui cherchait sa voix.

Chanter. Donner corps au trop-plein. Laisser s'envoler les oiseaux prisonniers. Clarté de la source à l'intérieur. Il faut s'y pencher, regarder souvent, attentivement. Mais nous obstruons si facilement l'accès à nous-mêmes. Alors vient la dissonance. L'acuité profonde que nous donne l'intuition s'émousse et se cendre.

Chanter. Offrir sa nudité, sa fragilité pour faire éclore chaque être dans sa parcelle la plus intime. Goûter à la force indéfectible du lien lorsqu'il est sincère. Nos fragilités unies et exprimées sont la sève et le liant de nos immensités.